Affaire Khalifa Sall – “Kumba am Ndey…”

J’ai toujours un sentiment de gêne, parfois même de colère quand j’entends certaines prises de position dans l’affaire Khalifa Sall. Il s’agit de celles tendant à faire du Maire de Dakar, l’agneau de la fable devant le méchant loup qui serait notre justice. Dans une précédente contribution avec un titre sous forme de prière “De grâce, épargnez notre justice”, j’écrivais :

«Sans dire que la justice des hommes est infaillible, je rappelle simplement que c’est notre justice, vers qui nous nous tournons toujours pour faire redresser le tort qui nous a été fait. Les hommes et femmes qui composent la magistrature de notre pays, de par leur qualité intellectuelle et leur serment, méritent au moins la présomption de bonne foi, surtout que jamais, la preuve est faite de leur partialité, bien au contraire. Je refuse de croire à l’infidélité de nos juges à leur serment et je rejette tout ce qui se dit malheureusement dans ce même sens tels que “instrumentalisation de la justice”’, “immixtion de l’exécutif dans la justice”, surtout quand c’est dit par une personnalité publique». J’ajoute à ces critiques, celle de «Kumba-am-ndey, Kumba-amul-ndey», en référence à l’histoire de deux demi-sœurs dont la mère de l’une, couvrait de toutes les attentions sa fille et maltraitait la seconde qui était orpheline. A travers ce dicton, nos cours et tribunaux sont dépeints sous les traits d’une justice à deux vitesses, fouettarde ou magnanime suivant des critères purement subjectifs.

C’est véritablement un mauvais…procès et surtout une injuste sentence à l’encontre du gardien des libertés dans la République. Parlant de “Kumba am ndey, Kumba amul ndey”, il faut rappeler que dans l’affaire dite de «la caisse d’avance» de la Mairie de Dakar, c’est une dizaine de personnes qui sont en détention. Toute l’attention est portée sur le seul Khalifa Sall qui devient ainsi un «Samba-am-dey» et les autres des «Samba-amul ndey» ( Samba, comme masculin de Kumba).

La justice, en philosophie, n’est pas seulement «la justice-institution», qui désigne les organes et les personnes appliquant le droit. C’est aussi «la justice-idée» qui renvoie à la notion d’équité, de considération et de traitement égalitaires. C’est enfin «la justice-devoir» qui désigne la vertu par laquelle on respecte les droits des personnes en tant qu’elles sont considérées comme égales. Ces deux dernières notions de la justice s’adressent à tous les hommes. Dès lors, les souteneurs de Khalifa Sall traitent injustement ceux qui sont  poursuivis avec lui. Tous sont pourtant unis par des faits constants, incontestables et incontestés qui ne sont presque jamais évoqués par leurs défendeurs et partisans.

Les fausses factures et les procès-verbaux de réception fictive ne sont pas une création du parquet encore moins des Inspecteurs généraux d’Etat. Que l’argent public dont il est question soit dépensé à construire des mosquées ou à secourir les personnes en détresse, n’a pas ou a peu d’importance pour le juge pénal. Ce qui l’intéresse ce sont d’abord l’existence effective des faux documents comptables et leur utilisation pour se faire remettre des fonds publics, ensuite, si les dits faits sont l’œuvre des mis en cause.

Au sujet du débat sur l’immunité parlementaire “post-arrestation” du Maire devenu Député, ses défenseurs, dernièrement rejoints par un ancien ministre de la justice, soutiennent qu’on est dans un cas de détention arbitraire par la violation des dispositions de l’article 61 de la Constitution reprises par l’article 51 de la loi organique portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale.

Ils évoquent en effet le 2ème alinéa selon lequel, «aucun membre du parlement ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou délictuelle, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée nationale». Mais ils perdent de vue que la détention ne figure pas dans cet alinéa mais dans le précédent où on lit : «Aucun député ne peut être poursuivi, recherché, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions». Il s’agit de deux situations totalement différentes : l’alinéa 1 pose le principe d’irresponsabilité du député ; on parle d’immunité fonctionnelle qui exclut toute incrimination ou poursuite contre un député pour les actes et propos à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, tandis que l’alinéa 2 établit le principe d’inviolabilité de la personne du député ou immunité de procédure, qui maintient les poursuites mais met le député en cause, à l’abri de mesures coercitives sauf sur autorisation de ses pairs.

La question qui se pose à l’exégète est : Pourquoi le constituant sénégalais qui a exhaustivement listé les actes judiciaires non applicables contre un député pour les actes et propos liés à l’exercice de ses fonctions parlementaires, s’est limité à seulement deux actes (poursuite et arrestation) dans l’alinéa portant sur des faits délictuels ou criminels sans rapport avec la fonction de député ?

A mon avis, s’il voulait intégrer les situations semblables à celle de Khalifa Sall, il aurait ajouté la détention parmi les actes judiciaires inapplicables contre un député pour les infractions extra-parlementaires, ou plus explicitement, par exemple, dire que «la détention de tout député définitivement élu, est suspendue pendant toute la durée des sessions de l’Assemblée nationale». Cela n’étant pas, tant que l’Assemblée nationale ne demande pas l’élargissement du député Khalifa Sall, son maintien en détention demeure tout-à-fait légale. Toutefois il ne peut être envoyé en jugement qu’après la levée de son immunité parlementaire comme ce fut le cas avec Barthélemy Dias.

Dans un Etat de droit, tous les citoyens sont d’égale dignité et égaux devant la loi. Le Président Obama a martelé que l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes. Nous n’avons certainement pas atteint le niveau des Etats où les gouvernants, à commencer par le premier d’entre eux, le chef de l’Etat, sont pénalement punissables, mais nous devons travailler à cela en commençant justement par poursuivre et punir sans complaisance, toutes nos personnalités politiques et administratives qui se rendent coupables de malversations dans la chaîne de mise en œuvre des finances publiques ou auteurs d’actes incompatibles avec les hautes fonctions de l’Etat. Je parle ici des faits qui en France, ont perdu François Fillon et Dominique Strauss-Kahn sur le chemin de la présidence de la République.

Le Sénégal n’atteindra jamais ce niveau de bonne gouvernance si on continue à critiquer et à tenter de  mettre la pression sur notre justice ou encore à appeler le Gouvernement au “Masla” (arrangement) quand une personnalité célèbre est entre les mains de la justice. Le seul fait interpeller le Président de la République dans une affaire judiciaire constitue une négation de l’Etat de droit. La fermeté seule, dans les cas de corruption ou autres malversations financières, peut mettre un terme à ces pratiques, car elle enlèvera toute possibilité pour les responsables étatiques, d’échapper aux rigueurs de la loi dans la reddition des comptes, au terme de l’exercice de leurs fonctions. Sinon, ce sera un éternel cycle de vol-arrestation-arrangement-libération-vol.

Par Sankoun Faty

Colonel de Gendarmerie à la retraite

Juriste, membre de l’Association pour le Développement de Sédhiou

(Collectif des organisations de la société civile de Sédhiou)

E.mail : sdfaty@gmail.com

 

4 Commentaires

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