Un dialogue national placé sous le signe de l’impératif de souveraineté du Sénégal  (Mamadou SY Albert)

Les acteurs politiques, sociaux, culturels et religieux ont certainement besoin de communiquer, de procéder à des échanges fructueux au sujet de l’état émergent ou dégradant du Sénégal et de la gouvernance des affaires publiques, au regard des conflits institutionnels récurrents entre les gouvernants et les acteurs politiques de l’opposition et de la société civile.

Les problèmes ne manquent guère pour discuter. Ce dialogue n’est point un exercice facile à mener. L’absence des partis de l’opposition les plus représentatifs à la cérémonie d’installation du Comité de pilotage et de son président illustre certaines pesanteurs politiques et organisationnelles à lever.

Un dialogue national constitue, dans son principe, un grand moment démocratique dans la vie d’une Nation. C’est la première fois qu’un président de la République en exercice convoque toutes les forces vives de sa nation sous ce format regroupant à la fois les acteurs politiques, ceux de la société civile et les représentants des organisations socio-professionnelles. C’est une opportunité politique offerte à ces différents acteurs du paysage politique national pour discuter de l’état de la situation politique, économique, sociale et culturelle du Sénégal et de son avenir dans les prochaines années. Ce besoin de communication, déficitaire depuis quelques années déjà, est indispensable au fonctionnement régulier d’une démocratie pluraliste.

Toutefois, le dialogue national ne devrait guère être un exercice d’exorcisme des peurs et des angoisses, de défoulement collectif ou une guerre des tranchées entre les partisans et les adversaires du pouvoir. Il ne devra non plus être un simple exercice narcissique pour une prise de parole démocratique. Il y aura certainement du théâtre, du défoulement, de la prise parole pour manifester son égo, pour se faire voir. Le dialogue national est un exercice hautement démocratique. Il devrait libérer la parole politique, sociale, culturelle, religieuse constructive et la conscience citoyenne.

Le dialogue à propos de questions majeures est une invite à une réflexion personnelle et/ou collective, qui elle, est sérieuse quand il faut diagnostiquer à la loupe l’état du Sénégal et son avenir. Il doit ainsi être un moment de réflexion, d’analyse et de propositions. Cette exigence d’un dialogue national inclusif, critique dans son essence et prospectif dans son esprit, sera-t-elle au rendez-vous des débats, des discussions des commissions et des plénières ? Il est difficile de répondre à ces questions pour le moment. Les réponses dépendront certes des termes de références du dialogue, mais également de la volonté politique assumée du président du Comité de pilotage, de son équipe et évidemment de l’état d’esprit des participants.

La nature du dialogue sera déterminante quant à la conduite des débats et la finalité des résultats attendus par les Sénégalais. Le dialogue national ne peut se réduire aux rapports conflictuels entre le président de la République et ses adversaires ou aux querelles au sujet de l’organisation des élections, de la loi électorale. Le dialogue national a d’autres centres d’intérêts nationaux aussi importants que les élections, les lois électorales, la séparation des pouvoirs, le statut du chef de l’opposition. La crise de l’éducation, de la santé, du citoyen sénégalais et la situation sociale et économique dans laquelle se meuvent les Sénégalais et l’avenir du pays, méritent d’être soumis à une réflexion profonde.

Le président Famara Ibrahima Sagna a une responsabilité politique historique personnelle dans la prise en charge effective ou non des préoccupations des populations, des menaces pesant sur la société sénégalaise contemporaine et son futur proche et lointain. Il a des atouts à faire prévaloir. Il jouit de la confiance du chef de l’État, de la majorité présidentielle, de franges importantes de l’opposition et de l’opinion publique. Il ne devrait point trahir cette confiance. Il devra être un homme d’État capable de construire des consensus nationaux forts.

Le dialogue national sincère exige du président du Comité de pilotage du dialogue national, une posture de neutralité politique absolue. Il devra être à la hauteur des enjeux des préoccupations de citoyens sénégalais, des acteurs politiques et de la société civile et du président de la République. Le Comité de pilotage doit nécessairement faire preuve d’une grande capacité d’écoute, d’ouverture, de fermeté dans la recherche de propositions et de solutions de sortie de crise.

La neutralité du président du Comité de pilotage est indispensable à l’expression du pluralisme des idées, des propositions, des consensus nationaux et de la souveraineté du dialogue national. Le dialogue national souverain pourra ainsi favoriser l’éclosion des idées contradictoires et des consensus significatifs au sujet des grandes controverses politiques, culturelles, sociales et religieuses. Par contre, toute tentative de manipulation ou de réduction des enjeux du dialogue à des fins politiciennes, mènera le Sénégal à la case de départ : la mésentente perpétuelle, le discrédit des institutions et la désaffection générale vis-à-vis de la gouvernance des affaires publiques.

 

 

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